Le rap a toujours été protéiforme et sa domination actuelle décuple les efforts créatifs de la part des artistes, pour se différencier. S’il est né au début des années 1980 en piochant dans la funk et le disco, il prendra tour à tour au jazz, à la soul, au métal… 40 ans plus tard, les termes désignant des sous-genres se multiplient : de l’évidente drill issue de la trap à l’affolante new jazz en passant par la Detroit, la richesse du rap s’étend aux yeux de certains alors que pour d’autres, ces mutations en sont l’apauvrissement.
Sur NewTone, on fait plutôt partie des premiers. Constamment à l’affût de nouvelles tendances comme la sexy drill qui rompent avec la lisse stagnation du rap mainstream, on décrypte ces mouvements et ces sous-genres.
Analyse du jerk, une tendance underground et difficile d’accès qui nous replonge à la fin des années 2000 et s’inscrit dans le renouveau du Y2K.
La jerk : nouvelle tendance ou résurrection ?
Popularisé par des artistes tels que Xaviersobased (de l’ancien collectif 1c), Subiibabi ou le producteur Kashpaint, le genre se renouvelle notamment au sein de la scène Soundcloud. Ceci dit, l’essence de la jerk ne date pas d’hier.
Historiquement, le terme viendrait d’une danse devenue virale en 2009 avec le clip de You’re a Jerk des New Boyz. En creusant un peu, on s’aperçoit que ce qui a vraiment nourri la jerk comme un genre musical au delà d’une danse, c’est une rythmique caractéristique de certains morceaux californiens des années 2010.
Effectivement, ce qui s’apparente le plus au sous-genre qu’on connaît aujourd’hui, c’est Rack City de Tyga, produit par la légence DJ Mustard. Le pattern de snares qu’on y retrouve a traversé les époques.
Comment reconnaître et produire de la jerk ?
Au-delà de ce pattern issu de Rack City, la jerk actuelle se caractérise par un attrait pour la saturation, le pitch des voix ou le traditionnel « aye ».
La jerk dans le rap français
Comme toujours, c’est compliqué de faire une liste exhaustive des artistes d’avant-garde qui ont su capter le genre. Sur Soundcloud, on remarque une ribambelle de jeunes mais il faut constater que peu en sortent. On note en revanche les titres d’artistes versatiles et branchés comme Yuri Online, Ricky Bi$hop ou Kid Exotic.
Attention : ce n’est pas parce qu’il y a une tendance qu’il faut la suivre
Qu’on s’adresse au public ou aux artistes, il faut rappeler une chose. Les nouvelles tendances sont excitantes jusqu’à ce qu’elles soient reprises abusivement. On l’a vu avec la jersey drill : la capacité des artistes à utiliser une rythmique et à la détacher des codes culturels dans lesquels elle s’est développée peut signer la mort d’un mouvement. Seule une adéquation sincère entre l’artiste et le genre proposé peut résulter en une musique durable.
Même si Kerchak a sorti un titre qui s’en rapproche, c’est difficile d’imaginer la jerk atteindre des plafonds de stream et c’est ce qui fait son charme.