Difficile de mieux nommer ce projet que « DMVP ».

Sherifflazone, c’est vraiment ce rappeur qui a le syndrôme du sauveur et qui s’en sert à bon escient. Comme il le dit dans son interview chez Konbini, il ne rappe pas depuis hier et il a l’énergie d’un gars désabusé qui sait que ça peut ne pas marcher. Là où beaucoup d’artistes rappent juste avec l’énergie de percer… et disparaissent 3 ans plus tard. Sheriff dans DMVP, il incarne à la fois ce jeune banlieusard qui veut se sauver du piège et ce rappeur qui respecte la musique qu’il fait, et veut y apporter quelque chose pour la tirer vers le haut.

Et c’est ça qui permet d’être MVP (most valuable player au basket) : autant motivé par ego que par altruisme.

On a donc 13 titres qui composent cette mixtape, dont plusieurs prods de Futtry (Zola, Key Largo…). En étant l’un des seuls en France qui parvient à lier le flow DMV à une esthétique résolument trap et accessible, il livre un projet sans doute fondateur pour le renouvellement de la scène. Si on peut reprocher à La France d’être, encore une fois, incroyablement en retard sur ces sonorités, on ne peut pas le reprocher à Sheriff qui arrive au bon moment, au bon endroit, avec les bons outils.

J’ai déjà beaucop parlé, sans faire de commentaire sur la musique ; mais ce contexte me semble essentiel pour comprendre ce projet. De toutes façons, c’est assez rapide : DMVP remplit totalement son contrat. On a des sons bien crades comme STACK, des leçons de flow comme sur LOCAL, un marqueur comme SHERIFF, ou encore un vent de fraîcheur avec MBELI.

Lyricalement, rien d’exceptionnel à noter. On n’a pas spécialement de fulgurances et c’est peut-être la seule faiblesse du projet, sans pour autant qu’elle aie quoi que ce soit de rhédibitoire. C’est presque le contraire : on s’identifie d’autant mieux que l’écriture le place comme un représentant plutôt que comme un guerrier.

C’est un peu ce qu’on aurait pu attendre de La Fève sur 24 : parvenir à s’affilier à la trap américaine des années 2010 tout en y apportant une dose d’avant-garde avec des prods et de placements audacieux.

Enfin, gardons à l’esprit que c’est une mixtape, sous-entendu c’est construit avec une certaine liberté d’expérimentation. Et en ce sens, c’est terriblement excitant, car les titres sont bons dans toutes ambiances. L’outro fait parfaitement son travail d’ouvrir vers quelque chose d’autre que ce qu’on a entendu sur les 12 titres précédents. Ca témoigne d’une vision rassurante.